Livre d’or

Michel Camiade,  gîte « la grange démolie », mai 2022, 5 étoiles Google

Quinze kilomètres. Douze minutes. A l’heure où un dépaysement ne se justifie que par une somme conséquente mesurant l’espace-temps, voilà qui ressemble à un gag indélicat. Pourtant, les vacances de proximité ne manquent ni de charme, ni de vertus. Comme celle de limiter fortement l’empreinte carbone.
Se démultiplier dans les contacts, se complexifier de rencontres, s’enrichir d’approches, s’attentionner de perceptions, il suffit de le vouloir vraiment. Au Domaine de Mons, carrefour de paysages entre Causse aride et Limargue fertile, tout vivant se trouve immédiatement absorbé dans des faisceaux naturels qui réduisent les réseaux sociaux au niveau de gadgets trop humains. Le tilleul à palabres tend un filigrane pointilliste devant la maison de maître. Juste à côté, la vaste grange templière expose sous charpente son ossature complexe. A l’ombre des chênes immenses et vénérables, les chevaux arpentent au rythme de leur broutage les prairies débordantes d’une flore printanière. Les chouettes en miaulements dès la nuit tombante, les huppes en réponse d’une forêt à l’autre, le renard qui trace apeuré à travers la prairie. Le papillon, graphiste noir sur blanc, attend l’éveil matinal, figé sur une graminée. Intense est l’impression de pénétrer chez des hôtes bienveillants, et pas seulement ceux qui nous reçoivent dans leur gîte, généreux de leur profonde humanité. Tous ces vivants de tous grades qui peuplent les bois, les rochers, les pâtures, les murets, les cabanes, les granges, les tanières.
Côté humain, à l’intérieur, le volume spacieux de La Grange Démolie enclenche les sensations. La lumière y rentre à flots, tandis que la grande salle en soupente semble envelopper dans un cocon protecteur. Les murs à teintes douces captent et renvoient le passage des heures et on s’y inscrirait volontiers dans le défilé des saisons. Une petite éternité affleure ces lieux clos mais ouverts à l’indicible. Sous le halo un peu mystérieux d’une présence discrète, les fermiers de Mons veillent et vaquent. Mille tâches les accaparent mais la joie d’avoir choisi leur destin les défatigue. Disponibles, Marianne et Jacques le sont pour un sourire, un mot échangé, un conseil. Ils sont paysans, fiers de leur terre, proches de leurs animaux. Attentifs, ils ne perdent jamais le sens d’une relation au vivant majuscule qui tisse la trame de leurs jours.
Quelques temps au Domaine de Mons, en provenance de la planète Mars ou du coin de la rue, c’est l’opportunité d’un pas de côté vers soi-même, une occasion unique et rare de se surprendre. De se découvrir autre, régénéré, rebranché sur la source de vie.